Philippe Sinault, le team principal d’Alpine Endurance Team, était présent mardi dernier au Mans lors de la présentation du film officiel des 24 Heures du Mans. Endurance24 est allé le voir pour faire un bilan de 2024, revenir sur Le Mans et le double abandon et évoquer 2025…
On va revenir sur le coté douloureux. Comment avez-vous vécu les images que vous avez revues dans le film sur l’abandon de vos deux autos en Sarthe ?
« Ca fait toujours mal parce qu’on avait jusqu’alors montré un bon visage que ça soit le début de saison WEC, mais aussi sur la semaine du Mans. Très honnêtement, on savait que ça allait être difficile, mais ce type de panne, on ne l’a pas vu venir. Donc frustrant, mais on a eu l’impression que ça faisait partie d’un parcours initiatique. Si on a un regard sur l’ensemble de la saison, ce sont les deux seuls abandons sur 16 départs ! On a beaucoup appris et nous n’étions pas suffisamment prêts pour affronter la concurrence sur une course comme les 24 Heures du Mans. On a pris le sujet, on a essayé en tout cas, avec philosophie et la conséquence, c’est qu’il y a une formidable réaction de l’ensemble de l’équipe et des équipes de Viry-Chatillon (moteur) dont je salue le travail. Ils ont très bien et très vite réagi suite à ce double abandon. C’est ce qui nous a amené à tout de suite nous remettre sur une bonne dynamique pour finir la saison plutôt correctement. »
Vous étiez un petit peu « au fond » au moment du Mans et tout de suite, vous êtes repartis sur le Brésil puis une deuxième partie de saison excellente avec un premier podium et une quatrième place finale.
« Je ne veux pas être démago, en tout cas en essayant de ne pas trop l’être, mais cette incidence, ce drame, entre guillemets, pour nous, du Mans, nous a permis de réagir et peut-être de mieux travailler, d’être plus performant sur la fin de saison qu’on aurait pu l’être en temps normal. »
« J’ai la sensation de vivre un rêve éveillé, d’être un vrai privilégié ! »
Est-ce que vous vous étiez fixé une place en fin d’année au niveau du championnat du monde parce que quatrième, devant des équipes qui ont déjà fait le WEC, c’est plutôt pas mal…
« L’idée était d’être le meilleur des nouveaux arrivants. Forcément, on s’est retrouvé à rêver d’être devant BMW, notamment. On s’est attaché, même sans en faire une priorité, à jouer ce challenge là sur les dernières courses, notamment à Bahreïn. C’est ce qu’on a réussi à faire. »
C’était votre première année à la tête d’une équipe alignant une « vraie Hypercar ». Comment avez-vous vécu cela ?
« C’est formidable. Tous les jours, je me levais en disant que j’étais un privilégié. Il faut savoir le réaliser. C’est énormément de pression, certes, mais tout ça fait partie du contexte. Ce qui prime, c’est surtout la sensation de vivre un rêve éveillé, d’être un vrai privilégié. »
« J’ai l’impression que Nicolas a déjà ce rôle-là depuis très longtemps avec nous ! »
À partir de l’année prochaine, vous allez partager la tâche avec un certain Nicolas Lapierre. Comment cette association est venue dans votre tête ?
« Ce n’est même pas venu dans ma tête particulièrement. Avec Nicolas, on travaille depuis tellement longtemps ensemble qu’on échange tout le temps sur ces sujets-là, que ça soit le sportif, la stratégie, les humains. Je lui ai souvent demandé de m’épauler sur l’intégration des jeunes pilotes. Quand il y a des messages à faire passer, avec Nicolas, je sais très bien qu’il va être entendu et écouté. Je l’ai toujours considéré, on l’a toujours considéré, comme un atout indispensable au fonctionnement de l’équipe. Donc quelque part, on n’a pas l’impression qu’il a changé de rôle. Il est dans quelque chose d’un peu plus affirmé, mais tout se fait de façon tellement naturelle. J’ai l’impression qu’il a déjà ce rôle-là depuis très longtemps avec nous. »
Qu’a-t-il pensé de sa première expérience où il était plus en observateur ?
« D’abord, il a pris son rôle, un peu plus affirmé, vraiment à cœur. C’est son choix de ne pas rouler à Bahreïn. En aucun cas, on se serait permis de lui demander de ne pas disputer la finale du WEC. Il a voulu mettre à profit cette expérience de Bahreïn pour avoir une vision un peu générale, plus globale et c’est ce qu’il a fait. Après, Nicolas, c’est un « chiant de nature », on le sait (rire). C’est ce qu’on lui demande, il est hyper exigeant. Ce que je lui demande, c’est d’appuyer là où ça fait mal. Il le fait intelligemment et on a déjà mis en place certaines choses pour répondre à ses remarques qui sont à la fois pertinentes. On n’a rien découvert, mais il nous a laissé entendre quand même qu’à son sens, il y avait des priorités sur lesquelles on travaille. »
« 2025 a déjà commencé depuis déjà plusieurs courses ! »
On attaque maintenant l’intersaison. Quel est le plan de travail ?
« Ce jeudi et vendredi on est à Portimão puis on va rouler au Castelet mi-décembre. On n’a pas arrêté depuis Bahreïn. Ça fait partie de la continuité de la saison. Pour nous, la saison n’est pas terminée, c’est une vis sans fin. Certes, 2024, on ponctue quelque chose, mais 2025 a déjà commencé depuis déjà plusieurs courses. »
Quelles sont les directions de travail ? Continuer sur la performance ? La fiabilité de la voiture ?
« La fiabilité, parce qu’on a bien vu que la performance, quand on veut aller la chercher, elle est là. En tout cas, on n’est pas trop loin du sujet. Par contre, si on veut être plus performant dans la durée, il va falloir qu’on ait la fiabilité sur des courses supérieures à huit heures comme à Bahreïn. C’est en bonne voie. Encore une fois, on va tester beaucoup de choses dans ce but-là sur ces deux dernières séances de l’année. »
Pour information, les deux équipages Alpine Endurance Team pour le WEC 2025 ont été annoncés !