Pour limiter les disparités liées aux gabarits des pilotes, une nouvelle règle pourrait entrer en vigueur dès la saison 2025 du Championnat du Monde d’Endurance de la FIA (WEC), imposant une moyenne de poids par équipage.
Selon les informations d’Endurance24, les instances dirigeantes du WEC, la Fédération Internationale de l’Automobile (FIA) et l’Automobile Club de l’Ouest (ACO), envisageraient d’introduire cette nouvelle disposition en catégorie Hypercar, mais aussi en LMGT3. L’objectif : corriger les écarts liés au poids des pilotes, jusqu’ici non réglementé, en complément du poids minimum des voitures défini par la réglementation technique et la Balance de Performance (BoP).
Si cette mesure n’apparaît pas encore dans le règlement sportif publié dont la version la plus récente a été publié au mois de décembre, elle pourrait prochainement être officialisée. « Nous communiquerons bientôt », nous a répondu Pierre Fillon, président de l’ACO, interrogé sur le sujet lors des 24 Heures de Daytona.
Réduire les effets de la différence de poids entre les pilotes
Plusieurs pilotes, à commencer James Calado, avaient déjà exprimé leur frustration face à cette inégalité. Le pilote Ferrari AF Corse, pesant environ 70 kg, expliquait lors des 8 Heures de Bahreïn 2024 : « Je pèse 10 ou 20 kilos de plus que d’autres, ce qui représente une demi-seconde. […] Pour un pilote plus lourd de 20 kilos, cela peut signifier une seconde et demie au Mans. Cela remet les choses en perspective. »
Le Britannique avait également révélé à Bahreïn avoir été hospitalisé pour malnutrition après les 1 812 kilomètres du Qatar, conséquence directe de ses efforts extrêmes pour perdre du poids. « J’ai été malade cette année parce que j’ai perdu beaucoup de poids – j’ai été hospitalisé pour malnutrition », a-t-il confié. « J’étais sous traitement parce que je courais et ne mangeais pas, essayant désespérément de perdre du poids. C’est trop dangereux pour moi d’atteindre le poids que je souhaite. »

© Nico Deumille
Selon les premières indications, le poids moyen des pilotes d’un équipage serait fixé entre 80 et 82 kg. Si cette moyenne est atteinte ou dépassée, aucun ajustement ne serait requis. En revanche, pour un équipage en dessous de cette valeur, un lest serait ajouté à la voiture. La mesure s’inspirerait ainsi d’une règle similaire adoptée en 2015 en LMP1 et de ce qu’on peut déjà observer en GT World Challenge Europe.
Des réactions globalement positives
Dans l’attente de précisions officielles et désireux de mieux comprendre, mais surtout de recueillir l’avis des principaux concernés par cette mesure, Endurance24 est allé à leur rencontre à Daytona, en donnant la parole à des profils variés.
Will Stevens, pilote Cadillac Hertz Team JOTA, salue cette initiative : « Je pense que quelque chose va probablement se passer, mais quoi exactement ou ce que cela va être, je ne le sais pas personnellement pour l’instant. Mais je suis content de cette évolution. Vous savez, au bout du compte, il y a des pilotes qui sont plus lourds, d’autres plus légers. Honnêtement, je pense que la moyenne sur la grille est assez similaire. Donc, je pense que les différences ne sont pas aussi grandes que certains le prétendent. Mais il y a des pilotes extrêmement légers et d’autres plus lourds. Finalement, dans un championnat où nous essayons d’avoir un terrain de jeu équitable pour tout le monde, je pense que c’est une bonne chose. Cela élimine les excuses liées à ce genre de différence. Je pense que c’est un bon changement pour le WEC. »
Kevin Estre, champion du monde d’endurance en titre et hyperpoleman des 24 Heures du Mans 2024 avec Porsche Penske Motorsport, voit également cette règle d’un bon œil : « Je suis dans les lourds, donc pour moi, ça va m’aider. En tout cas, j’aurai moins de désavantages. Je pense que c’est bien et ça rajoute un peu de fair-play. Quand on met trois poids plumes, on va dire, si on prend l’exemple de la Ferrari n°50 (avec Antonio Fuoco, Nicklas Nielsen et Miguel Molina, Ndlr), trois plus ou moins poids plumes, ils vont tous être au poids moyen d’environ 80 kg. Alors que moi, je serai à 86 ou 87 quand je roule mais Laurens sera un peu plus bas et dans ce cas-là sur l’ensemble de la course, tout le monde sera à peu près homogène et ce sera fair-play. »
James Calado, vainqueur des 24 Heures du Mans 2023, reste prudent en attendant plus de détails mais se réjouit de cette possible évolution : « Je pense que cela rendrait les choses plus équitables entre les voitures. Rien n’est encore écrit, rien n’est confirmé, mais j’espère que quelque chose se concrétisera. Si c’est le cas, ce serait vraiment plus juste. C’est quelque chose que je défends depuis deux ans. De notre côté, cela nous donnerait un petit avantage en termes de performance par rapport à l’année dernière, même si nous étions déjà compétitifs. Je trouve simplement que c’est équitable. Tout le monde commencerait les qualifications avec le même poids, ce qui est juste. On ne pourrait s’en prendre qu’à soi-même en cas de mauvais résultat. Et si on fait du bon travail, c’est encore plus gratifiant, car tout le monde est sur un pied d’égalité. »

© Nico Deumille
Quid des qualifications ?
La question au sujet des qualifications reste encore floue à ce jour pour de nombreux acteurs. Si la moyenne venait à s’appliquer en qualifications, un déséquilibre persisterait inévitablement selon la composition des équipages. En effet, les équipes privilégieraient, à juste titre, l’envoi du pilote le plus léger pour cet exercice de performance pure, d’autant plus s’il est particulièrement rapide. Le piste privilégiée serait donc un poids standard, fixé par les instances, ajusté par un lest spécifique à chaque pilote, dans le but de garantir une égalité quasi parfaite entre tous.
Il est clair que le solution miracle n’existe pas et que le sport automobile ne se limite pas à des valeurs théoriques dans un tableau. Cette évolution du règlement semble recueillir un accueil positif au sein du paddock malgré toutefois quelques réticences.