Suite de notre entretien avec Mike McGregor, responsable du programme d’endurance de Goodyear Racing. Il nous parle cette fois ci des changements opéré au sein du service compétition du manufacturier et d’une manche délicate en WEC, celle de Bahreïn.
Quels ont été les changements au sein du département compétition avec l’arrivée du LMGT3 ? Avez-vous été contraint de le réorganiser ?
« Les personnes clés impliquées sont restées en place. Nous avons dû augmenter notre équipe d’assistance sur les pistes, elle a été agrandie en raison de la façon dont nous gérons l’assistance. En WEC, chaque constructeur dispose d’un ingénieur dédié. A partir de fin octobre 2023, lorsque les spécifications ont été officiellement mises sur le marché, nous avons commencé à fournir des services support à nos clients. A chaque fois qu’une voiture a été testée, nous nous sommes engagés à envoyer un ingénieur d’essais afin que nous puissions en apprendre le plus possible sur le produit. Nous voulions aussi nous assurer que nous donnions aux équipes un objectif aussi compétitif que possible, plutôt que de nous contenter de donner juste des « chiffres » à l’équipe. Il s’agit toujours de performance, toujours de tirer le meilleur parti des pneus. C’est toujours difficile avec une nouvelle catégorie, de nouvelles équipes, des gens qui n’ont pas nécessairement cette relation avec l’ingénieur lui-même, d’avoir le niveau de confiance que nous ne sommes pas seulement là pour la sécurité, mais qu’en fait, si vous écoutez vraiment et passez du temps avec votre ingénieur de piste, vous pouvez exploiter plus de performance de la part des pneus. Elles ont bénéficié d’un plus grand nombre d’avantages en termes de performances plus tôt dans l’épreuve. »
Pouvez-vous donner quelques chiffres ? Le nombre de pneus aujourd’hui en ELMS, aux 24 Heures du Mans, combien de personnes aujourd’hui…
« En ELMS, ce n’est pas très différent dans les chiffres globaux parce que nous avions le GTE et LMP2. Donc, globalement, la moyenne est d’environ 35 personnes et je pense que nous étions environ 30 personnes l’année dernière. Pour le WEC, évidemment, il s’agit d’une vraie augmentation car nous avions moins de voitures. Je pense donc que nous avons probablement 10 à 12 personnes de plus au total. Pour Le Mans, c’est une échelle complètement différente avec 39 voitures en GT3 et LMP2. De nombreux éléments sont les mêmes au cours de l’année, mais l’ampleur du Mans est inégalée. Etant le plus grand événement de sport automobile pour Goodyear depuis son retour en Championnat du Monde d’Endurance WEC, il y a presque cinq ans, le sentiment de responsabilité est élevé. En 2017, nous avions un peu plus de 50 % du plateau, alors que maintenant nous en avons 60 %. Goodyear a amené 7 500 pneumatiques en Sarthe. Environ vingt camions ont effectué les livraisons des pneumatiques sur le circuit. Du point de vue du personnel, il nous a fallu plus de 100 personnes pour gérer cela. Le grand avantage que nous avons, c’est que nous puisons dans notre réservoir de ressources du monde entier. Certains de nos ingénieurs Nascar sont venus au Mans. Le problème majeur de ces événements est qu’il s’agit probablement de l’événement le plus difficile à gérer, il faut donc le personnel le plus qualifié sur place. Il n’est pas possible d’augmenter progressivement les effectifs pour un seul événement, il faut du personnel capable de travailler à la limite. En tout cas, du point de vue personnel, voir toutes ces LMGT3 s’aligner pour la première fois sur la grille de départ des 24 Heures du Mans le samedi a été un moment de fierté et d’émotion, une sorte d’aboutissement de nombreux mois de travail ! »
Pour information : dans la voie des stands des 24 Heures du Mans, une équipe de 18 ingénieurs d’assistance de piste Goodyear a collaboré avec chaque team pour les conseiller sur les réglages et la stratégie. Contrairement aux autres catégories de courses d’endurance, les équipes LMGT3 ne disposent que d’une seule spécification de pneumatiques slicks et d’une seule de pneus pluie à chaque course. Les deux spécifications du Mans sont les mêmes que celles utilisées au Qatar, Imola et Spa en WEC. La Porsche 911 GT3 R Manthey EMA n°91 a franchi la ligne d’arrivée en étant le premier vainqueur de cette nouvelle catégorie de l’histoire du Mans, les pilotes Richard Lietz, Yasser Shahin et Morris Schuring ont bouclé 281 tours, soit plus de 3 800 km. De nombreuses écuries LMGT3 ont réussi à faire quatre relais avec un seul train de pneumatiques, soit parcourir environ 550 km ; près de deux fois la distance d’une course de Grand Prix de Formule 1. Une équipe a même bouclé 45 tours ou 613 km avec les mêmes pneus !
Un autre défi vous attend en WEC, le circuit de Bahreïn…
« C’est vraiment notre prochaine cible. En termes de niveaux d’abrasion, c’est le circuit le plus contraignant de la saison. Mais je pense que la première année, avec toutes les connaissances que nous avons du LMP2, on voit l’évolution des équipes d’une année sur l’autre, comment elles commencent à comprendre le produit et à le pousser plus loin. En fait, pour la première année, nous sommes prêts pour Bahreïn et nous devons nous assurer que nous sommes couverts pour l’année suivante. C’est comme ça que nous voulons gérer, nous essayons juste de garder une longueur d’avance sur le fait que les équipes repoussent un peu plus les limites à mesure qu’elles commencent à mieux comprendre le produit. »