Gillian Henrion, 3e du dernier championnat ELMS en LMP3 avec Team Virage, a été convié pour ses performances à participer au rookie Test de Bahreïn dimanche dernier dans la Porsche championne LMGT3 de Manthey PureRxcing. Il est revenu sur cette expérience pour Endurance24.
« C’était incroyable ! » lâche Gillian Henrion quelques minutes après ses derniers tours. Assis avec son père sous un palmier au cœur du paddock, sous prés de 30 degrés, le jeune homme a encore du mal à réaliser ce qui lui est arrivé. Pourtant la tâche n’a pas été facile avec deux grandes inconnues. La première concerne la voiture, une Porsche 911 GT3 R, un type d’auto qui ne lui est pas du tout familier. « Honnêtement, c’est une nouvelle voiture, une GT, je n’avais jamais roulé avec l’ABS ni le traction control (antipatinage). Il a fallu s’habituer sur 30 tours au total. J’avais juste fait 10 tours en GT4 sur une Aston Martin il y a longtemps. Mais la Porsche est facile à prendre en main et réagit très bien. Entre la LMP3 et la GT, c’est une approche totalement différente, aussi bien au niveau des freins que sur la façon de prendre un virage. Là, on va plus couper les vibreurs, amener du frein, garder la pression de frein longtemps. Ce n’est pas la même philosophie, mais c’est quelque chose que je viens de découvrir et qui est plutôt très agréable. Ce sont deux styles bien distincts, mais les deux sont très sympa. »
L’autre découverte était le Circuit International de Bahreïn, théâtre de la finale WEC la veille. « C’est un circuit que je ne connaissais pas, juste sur les jeux vidéos. En fait, il ne faut pas du tout attaquer les pneus, ne pas être agressif avec, sinon ça tient deux ou trois tours et on a ensuite une grosse chute de performance. J’en ai fait les frais sur ma dernière session où j’ai voulu pousser un maximum, essayer de faire le meilleur temps possible parce que c’est peut-être la dernière opportunité que j’ai. On voit directement que les pneus s’enflamment. Quand j’ai recalmé le truc, ça m’a permis de revenir dans des temps qui restaient cohérents. C’est un peu le même principe qu’Aragon Motorland l’an dernier en Michelin Le Mans Cup. Dès qu’on commence à attaquer les pneus ou à être un peu agressif, on perd directement de la performance et avant de la retrouver, c’est compliqué. »
Les 30 tours minimum à accomplir ont été répartis en trois runs bien distincts. « On a commencé par un premier de 10 tours avec des vieux pneus (150 kilomètres). Il a fallu s’adapter au plus vite et au mieux à la voiture, au circuit, à la chaleur, ce n’était pas simple. Ensuite, on a passé un train de pneus neufs pour 10 tours, juste avant midi. Je n’ai pas réussi à exploiter les pneus, j’ai eu du trafic, pas évident. Ensuite, on a refait 10 tours avec ces mêmes pneus en début d’après-midi. J’ai réussi à réaliser le même temps qu’avec les pneus neufs, ça veut dire qu’il m’en restait vraiment sous le pied. C’est bien, au moins, il y a une progression sur toute la journée. Je me dis qu’avec une ou deux sessions de plus, on aurait été encore plus performant. C’est prometteur et j’étais plutôt bien au niveau rythme. Il reste forcément des petits détails à corriger et apprendre, mais je suis plutôt content de cette journée. »
Il a également pu se comparer à l’une des Iron Dames qui a aussi roulé sur cette auto, Michelle Gatting (classée Gold). La Danoise connait très bien cette auto pour la piloter en ELMS. « En comparant sur mon dernier run avec des pneus frais (juste avant les pneus neufs) et, elle, avec des pneus neufs, on est à 5 ou 6 dixièmes. Ca reste des temps cohérents. Elle connaît la voiture, a roulé ce week-end (avec une Lamborghini GT3) et a piloté la même auto toute la saison européenne. Ça veut dire que c’est une pilote qui met du gaz et qui est censée placer l’auto devant. Je ne suis pas très loin, et avec un peu plus d’entraînement, je peux me rapprocher de ses chronos, voire les battre… »
En déroulant sa journée avec nous, Gillian Henrion a encore des étoiles plein les yeux. En même temps, ce n’est pas tous les jours que l’on pilote une auto championne WEC. Au moment de faire un bilan, il conclut : « Pour moi, ce fut un réel privilège, quelque chose que je garderais à jamais en mémoire. Franchement, de pouvoir rouler en WEC avec la voiture championne juste après Bahreïn, sur le même circuit en plus. C’est mythique, franchement ! Je suis très reconnaissant envers l’ACO, le WEC, l’ELMS et l’équipe Pure Rxcing de la chance que j’ai eue. Les sensations sont très sympas et forcément, j’ai toujours l’envie d’en montrer plus, de faire plus de tours. »
Maintenant, il faut vite revenir sur terre et se concentrer sur 2025, une saison qui ne s’annonce pas évidente. Le pilote de 21 ans a pourtant un sacré CV : champion Ligier European Series dès la première année, champion LMP3 de la Michelin Le Mans Cup dès la première saison et 3e en ELMS en 2024 avec deux victoires au compteur. Pourtant, « pour l’instant, je n’ai rien pour l’année prochaine. J’ai discuté avec quelques équipes en étant sur place à Bahreïn (depuis le début du meeting WEC), on verra ce que cela va donner. » Lors d’une précédente interview, il avait déjà précisé : « Aucune idée pour le moment. Ce fut le même cas de figure cette saison, ça s’est décidé très tardivement. Pour 2025, je ne sais toujours pas, on va essayer de voir un petit peu les opportunités qui s’offrent à nous, mais c’est vrai que le monde du sport automobile est parfois peut-être injuste et très compliqué. On dépend vraiment du financier. »