Ferrari et Toyota se sont livrés un duel pour la victoire des 24 Heures du Mans cette année encore. Bien qu’ils aient terminé premier et deuxième, le clan italien et le clan nippon n’ont pas réalisé la course parfaite.
En effet, la 499P n°50 a remporté la 92e édition de la classique mancelle marquant le deuxième succès consécutif de Ferrari. Cependant, le scénario de la course et du duel au sommet qui a tourné en faveur de la firme au Cheval Cabré était bien différent de celui du Centenaire, qui reste sans aucun doute l’édition du Siècle.
Plusieurs pénalités et une portière récalcitrante chez Ferrari
Les deux Ferrari 499P officielles, n°50 et n°51, ainsi que la “privée” n°83, n’ont pas toujours été dans les meilleures dispositions. La n°83 a pourtant tiré son épingle du jeu en première partie de course, notamment grâce à Robert Kubica sous la pluie, avec des pneus slicks, tout comme la n°50 alors pilotée par Nicklas Nielsen. Un choix judicieux, mais pour Ferrari, il était impensable de répéter la scène des 6 Heures d’Imola, sacrifiant la n°51 en lui chaussant des pneus pluie.
La Ferrari n°83 du trio Kubica / Shwartzman / Ye a terminé la journée du samedi en tête, avant d’écoper d’un stop & go de 30 secondes pour un accrochage avec la BMW M Hybrid V8 n°15. Cela a permis à la Toyota n°8 de prendre la tête avant la neutralisation nocturne. Toujours présente dans le top 5, la Ferrari “jaune” est rentrée avec des freins fumants peu après midi, dimanche, signant son abandon. “C’est certainement lié à l’avant de la voiture (système hybride) et probablement un faisceau qui a perdu sa connexion ou un problème de température,” a expliqué Ferdinando Cannizzo, directeur technique des programmes Endurance. “Tout ce que vous avez vu, c’était juste les freins parce qu’à cause de l’absence d’électricité, nous n’avons pas utilisé tous les freins du moteur électrique dans les derniers tours de piste. Tous les efforts ont donc porté sur les freins mécaniques, et c’est la raison pour laquelle ils étaient très chauds.”
Sur une piste sèche, les pilotes des deux 499P officielles ont exploité le potentiel de leur machine pour se hisser aux deux premières places à deux heures de l’arrivée. En tête avec quelques secondes d’avance, Nicklas Nielsen, sur la n°50, était loin d’imaginer que son équipier de la voiture sœur n°51, Alessandro Pier Guidi, allait entrer en contact avec la Toyota GR010 Hybrid n°8 et envoyer Brendon Hartley (alors 2e) en tête-à-queue à Mulsanne. Cette manœuvre lui a valu une pénalité de 5 secondes ajoutées à son avant-dernier arrêt aux stands.
La victoire de la Ferrari n°50 n’était cependant pas acquise, avec un problème de portière survenu lors de l’avant-dernier relais, rappelant le problème électronique rencontré par la n°51 lors du Centenaire. Se voyant présenter un drapeau noir et orange, Ferrari a dû réparer la portière récalcitrante. Un moindre mal puisque les hommes de la firme italienne ont adapté la stratégie en faisant 13 tours lors des deux derniers relais afin d’éviter d’avoir à effectuer un arrêt supplémentaire.
“Nous avons eu un peu de mal au début sur le mouillé, et j’ai vraiment poussé dans les dernières heures de la course pour garder la température dans les pneus et évidemment pour maintenir l’écart avec la Toyota derrière,” a expliqué Nicklas Nielsen, à l’arrivée. “C’était donc une dernière partie de course très délicate, surtout avec les économies de carburant. Si nous voulions gagner, nous n’avions qu’une seule option. C’était d’économiser du carburant. Je ne voulais pas vraiment me plaindre. J’ai juste demandé à l’équipe de me donner un objectif, évidemment un objectif énergétique par tour, et c’est tout.”
Des ennuis mécaniques malgré la bonne exécution opérée par Toyota
Arrivé deuxième lors de cette 92e édition, le constructeur nippon n’a toujours pas obtenu sa revanche face à Ferrari. Il faut dire que Toyota n’a pas commencé la course dans les meilleures conditions, avec des 11e et 23e places sur la grille.
La Toyota GR010 Hybrid n°7, qui s’élançait de la dernière position parmi les Hypercars suite à une sortie de piste lors des qualifications, a terminé à 14 secondes de la victoire, profitant directement de l’accrochage entre la voiture sœur n°8 et la Ferrari n°51. Le résultat serré ne reflète d’ailleurs pas toutes les difficultés rencontrées en coulisse par Toyota.
« Nous étions constamment en train de revenir et il se passait toujours quelque chose, » a déclaré José Maria Lopez, qui a été appelé en renfort pour remplacer Mike Conway, victime d’une chute à vélo jeudi, aux côtés de Nick de Vries et Kamui Kobayashi. « Nous avons perdu du temps dans les zones lentes, nous avons eu deux crevaisons, une pour Kamui et une pour moi dès que j’ai quitté le garage pour les deux derniers relais, quand c’était sec. Kamui a eu un problème de moteur, et moi aussi. Je n’aime pas les hypothèses, mais nous avions vraiment le rythme. Nous avons fait le tour le plus rapide de la course, mon tour a été retiré pour non-respect des limites de la piste, mais c’était aussi le tour le plus rapide. »
La voiture sœur n°8 a, quant à elle, échappé aux problèmes mécaniques et s’est d’ailleurs montrée aux avant-postes à différents moments de la course. La pénalité infligée à la Ferrari n°83, qui a écopé d’un stop & go durant la nuit, l’a propulsée en tête. Au total, la GR010 Hybrid de Kazuki Nakajima, Sébastien Buemi et Brendon Hartley est celle qui a passé le plus de tours en tête (98), dont une partie sous Safety Car.
« On a fait le meilleur tour en course. Mais après, sur les meilleurs tours, ce n’est pas nous qui ressortons comme les plus rapides. Mais par contre, je pense qu’en constance, en polyvalence et puis après, sur le travail de l’équipe, on était là, » a déclaré David Floury, le directeur technique de Toyota, à l’arrivée. « Globalement, je pense que l’équipe a opéré à un bon niveau, un niveau supérieur à celui de Spa par exemple, où nous avions commis quelques petites erreurs et pris une pénalité. »
Malgré l’une des « courses les plus propres du plateau » selon Buemi, le trio n’a pas été récompensé par un podium, complété par la Ferrari n°51. « On s’est fait envoyer en tête-à-queue. On perd 40 secondes. Le ratio est vite fait. Dans notre cas, c’est un ratio qui est encore assez favorable, » poursuit Floury suite à la collision, tout en évoquant également la situation de la portière de la Ferrari n°50. « Il s’est passé six tours avant qu’ils soient obligés de s’arrêter pour réparer leur porte. Ça faisait deux relais de 13 tours. On faisait des relais de 12 tours. 13 tours, cela se fait assez facilement quand tu as l’avance qu’ils avaient sans avoir à faire un arrêt supplémentaire. »